Mayotte évoque la gestion de l’après Covid-19, la filière pêche et la nécessité d’agir sur l’immigration clandestine
22 novembre 2021 à 04h44 (≈ 3 ans) | CONFÉRENCE DES RUP
Ce temps annuel et tournant (Mayotte a présidé cette instance entre février et novembre 2020) permet notamment de rencontrer les homologues des 9 régions ultrapériphériques à l’instar de la Guadeloupe, de la Martinique qui désormais a pris la présidence, de La Réunion ou encore des Canaries, très marquées par une éruption volcanique importante. C’est aussi un temps où les deux sessions – internes et partenariales – permettent d’adopter et de parapher une déclaration finale et de sensibiliser l’Union européenne sur les sujets majeurs à traiter à l’échelle des territoires.
La crise sanitaire s’invite dans les échanges
Le chef de l’exécutif départemental a évoqué le déséquilibre de « nombreuses filières affaiblies par les restrictions liées à la Covid 19. Les secteurs du transport, du commerce, du BTP, du tourisme, de la pêche et l’agriculture, ont, tous, besoin d’une attention particulière pour subsister tout en prenant en compte notre particularité insulaire » a t-il insisté dans son propos.
Un appel de Mayotte à l’action sur les flux migratoires
Lors de la session interne, le président Ben Issa Ousseni, après avoir fait part de son émotion d’intervenir devant ses homologues, a défendu un certain nombre de dossiers de Mayotte : ""l’amélioration de l’accessibilité physique, notamment le développement du Port. L’augmentation du volume des trafics maritimes favoriserait le désenclavement de Mayotte. Notre filière pêche qui demeure en attente d’une véritable concrétisation des aides au renouvellement de la flotte. Enfin, notre pêche artisanale mahoraise reste impuissante face aux géants que représentent les pavillons étrangers". "Notre défi quotidien est celui de la gestion des flux migratoires constants et du climat social en tension" a-t-il indiqué, un sujet brûlant qu’il a évoqué en alertant les autorités : « Au-delà des compétences nationales en la matière, je lance un appel pour que Mayotte soit considérée comme une zone d’urgence et pour que les dispositifs Frontex puissent être déployés. Cette approche est vitale pour la cohésion sociale de notre région ».Il a également tenu à rendre un hommage à Lucette Michaux Chevry, récemment décédée « qui a donné une véritable impulsion politique à la Conférence des Présidents des RUP »,
Défense de l’ultrapériphérie
Durant ces deux jours, le président s’est fait le défenseur de l’ultrapériphérie : " C’est tout l’engagement que je porte, de longue date, envers la défense de l’ultrapériphérie et envers les positions communes de la Conférence des Présidents des RUP" a-t-il noté. « Le maintien de ce dialogue politique ainsi que le renouvellement du partenariat construit au fil de ces 26 dernières années avec les institutions européennes, demeure une priorité » déclare-t-il aussi.
Les présidents ont signé la déclaration finale qui, dans la lignée de tous les propos, évoque la sortie de cette crise sanitaire et les vulnérabilités de ces régions. Si les efforts réalisés par l’Union européenne sont salués lors des négociations financières pour 2021-2027, les attentes n’en reste pas moins fortes pour reconnaître la singularité des RUP et apporter des réponses sur mesures à leurs attentes dans de nombreux domaines, dont l’égalité sociale.
A l’issue de la session partenariale, c’est donc la Martinique qui succède pour un an aux Acores pour la présidence des RUP. La délégation de Mayotte se dit convaincue du succès de cette présidence « qui sera active, entreprenante et permettra de continuer à défendre l’ultrapériphérie dans sa globalité ». La 1e vice présidente a officiellement remis un cadeau au nom de la délégation au nouveau président des RUP, Serge Letchimy.
L’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne du 15 décembre 2015 dit « Arrêt Mayotte »
La modification des statuts de Mayotte a créé l’opportunité de conforter le statut de l’Ultrapériphérie. En 2015, la Cour de justice de l’Union européenne a accueilli favorablement le choix de la base juridique de l’Article 349 du TFUE (traité sur le fonctionnement de l’Union européenne) proposé par le Conseil en vue de modifier le statut de Mayotte. En effet, au 1er janvier 2014, le changement de statut pour Mayotte a entrainé l’applicabilité automatique du droit de l’Union au sein de cette nouvelle Région Ultrapériphérique.
Pour ce faire, le Conseil s’est appuyé sur l’article 349 tandis que la Commission européenne, par une lecture restrictive, a estimé que « l’article 349 ne s’applique que lorsqu’il s’agit de déroger à l’application du droit primaire ». Autrement dit, pour la Commission européenne, c’est au sein des bases sectorielles qu’il convient de rechercher des adaptations pour les RUP. Or, ces politiques conçues pour l’Europe continentale sont loin de tenir compte de la réalité des RUP. Avec le soutien des 3 Etats membres des RUP, le Conseil de l’UE a ardemment défendu l’article 349 en tant que base juridique spécifique qui «prime sur les bases sectorielles et à laquelle il y a lieu de recourir lorsqu’il s’agit d’adopter des mesures spécifiques…». C’est cette approche qui fût retenue par la Cour Européenne de justice de l’Union européenne qui a rejeté les recours de la Commission européenne.
Ainsi, l’Article 349 du TFUE qui permet aux RUP de bénéficier de mesures particulières et de dérogations du droit communautaire, en fonction de leurs difficultés structurelles et de leurs atouts à valoriser s’est vu conforté.